vendredi 17 avril 2009

Le passage

Je n'avais pas franchement envie de fêter mes cinquante ans, et si ça n'avait tenu qu'à moi, je n'aurais rien fait de plus que pour un anniversaire habituel. Mais ce n'étais pas possible de passer à travers ce qui était devenu une affaire de famille. Donc je me suis résigné et intérieurement préparé.
Sur place, dans ce lieu même où nous avions fait notre repas de mariage, déjà vingt-sept ans, il restait effectivement bien des préparations à faire, de la nourriture à mettre en place dans les plats, des tables à habiller de nappes blanches, des fleurs à disposer en bouquet dans des vases ou des pots de confitures.
La pluie de la veille laissait place à un temps incertain et couvert.

Les uns après les autres, les invités sont arrivés. Uniquement la famille, soit plus d'une trentaine de personnes. Ma mère était là avec son mari, un peu fatiguée mais ne voulant rien laisser paraître. Les enfants, les miens et un neveu, avaient avec eux les pièces rapportées. Le plus jeune des enfants voisinait les cinq ans et faisait partie de la même génération que les miens. Nous n'étions, en définitive, que trois générations réunies, sans arrières-grands-parents. Les dessins colorés de nos mains sont venus faire une farandole que la grand-mère gardera.
Ma femme était en charge des terrines de poisson et de la salade de fruits qui s'en déclinée en brochettes de fruits. Mon beauf a fait des salades variées de crudités et ma belle-mère les gâteaux. Beau-père avait choisi les vins et apporté une douzaine de bouteilles de clairette de Die, bien trop même si nous aimons sa pétillance. Le plat principal était l'œuvre du restaurateur du village, gratin de légumes et veau en sauce.
Le repas fut ponctué par différentes animations, comme une chanson pour ma belle-sœur (sur l'air de "ne pleure pas, tu as toujours de beaux yeux"), un jeu où il fallait deviner le point commun des uns et des autres ,une séance slalom en rollers, et une rétrospective de ces cinquante ans. Deux de mes enfants avaient joué les détectives et recueilli les photos auprès de différentes sources pour concocter un montage vidéo sonorisé et projeté en grand sur le mur. Séquence souvenirs et émotions, surprise aussi de revoir des moments de notre vie, de notre famille, ces jours où nous étions "jeunes et beaux". Une rétrospective où l'on m'a vu les fesses à l'air et les cheveux au vent. Des larmes, beaucoup de rires.

Des cadeaux sont venus récompenser notre patience. J'ai eu des nougats, des saucisses en fagot, une couve (un pantin en pâte brisée, spécialité du coin), des bougies, des sous. Rien d'extraordinaire, mais sympathique et plaisant.

Nous avons organisé quelques séances de photos, et les huit cousins et cousines ont reposé pour la photo souvenir. En regardant leur visages rayonnants, en les voyant jouer ensemble, je mesure tout ce temps qui passe sans vergogne et j'entends ce petit air "ce sont nos jours heureux, mais on le sait si peu". Sans nostalgie, nous avons passé des moments agréables et nous sommes repartis dans nos lieux de vie.

J'étais un peu claqué et un mal de dos me donnait une bonne raison pour ne pas faire grand-chose dans les rangements, ce que ma femme m'a fait remarquer le lendemain. Mais il y avait bien assez de bras et de pieds pour tout remettre en ordre. Nous avons pris un dernier repas le soir, pour ceux qui restaient encore. Et ensuite, dodo. Car le lendemain, il restait encore beaucoup de route à faire.

2 commentaires:

Kab-Aod a dit…

Je ne peux pas dire que je sois amateur d'anniversaires consensuels, mais avoir, faute de famille, une flopée d'amis pour "marquer" mes cinquante ans ne serait pas s'en me rappeler que la vie est belle. Je trouve ton billet un tantinet maussade : ne boude donc pas ta chance ;)

JaHoVil a dit…

Tu as entièrement raison Kab-Aod, ce genre de réunion me mets généralement mal à l'aise (d'où le côté maussade du début), mais j'ai pu apprécier ces journées, ce que je ne rends pas bien. Je reconnais qu'en ce moment, je suis en plein refus de ces années qui passent alors que je ne le souhaite pas.
Je vais suivre ton conseil et ne plus bouder. Merci :)