samedi 26 mars 2005

Dans la salle de bain

, elle s'est enfermée dans la salle de bain !
Elle a tourné le verrou, mais je n'ai pas besoin d'ouvrir la porte pour le savoir, je vois bien que ce verrou est là, à travers l'interstice illuminé.
Je sais bien aussi que quelque chose ne va pas, car juste avant, je l'ai regardé à table, elle avait les yeux un peu rouges. Puis elle a quitté la table, avant la fin du repas, sans un mot.
Personne n'a fait attention, les conversations se sont poursuivies.
Je n'avais pas vraiment envie de répondre aux questions, anodines, des autres, je l'avais suivie en pensée, en coeur.
J'ai quand même fini de manger, rien ne presse, il faut du temps à la douleur.
Juste avant de débarasser la table, je suis allé voir où elle était partie, me demandant ce que j'allais trouver. Porte close, j'ai trouvé porte close.
J'entends des pleurs, presque silencieux.
Je lui demande d'ouvrir. -Non-.
Je lui demande ce qui se passe. -C'est trop dur-.
Je n'aime pas du tout parler à cette porte fermée, je n'aime pas du tout cette impuissance.
Je retourne à la cuisine faire la vaisselle. Sa douleur commence à entrer en moi, je serre les mâchoires pour ne pas me laisser atteindre. Je frotte, comme pour effacer cet instant de salissure.
Je retourne devant la porte fermée, m'assoie sur le tabouret, écoute les pleurs.
-Tu ouvres ?-Non-Allez, ouvre...
Le cliquetis annonce la fin d'un état, mais cette porte n'est pas mienne, je dois attendre encore sa libération. La porte s'ouvre, je me lève et entre.

Je hais ces moments de tristesse et d'impuissance.
Je me retrouve devant ma faiblesse, ma vacuité.
Quels mots ? Quelle attitude ? Quel geste ?

De la savoir blessée me blesse aussi, de la voir s'isoler de tout et donc de moi aussi me blesse encore.
Je ne dois pas lui en vouloir, ce n'est pas moi qu'elle vise ainsi.
Plusieurs pensées se chahutent : suis-je en quelque manière à l'origine de ceci, ai-je oublié de faire ou dire quelque chose, quelle est mon implication ?
Je préfère les laisser à leur querelle.

Maintenant, écouter, parler pour écouter, comprendre, consoler.
Trouver des mots vrais, ceux qui vont prendre du moi en moi pour donner.
Choisir de ne pas vouloir expliquer pour ne pas excuser. Etre présent.

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