vendredi 3 novembre 2006

En campagne

Ce matin, j'ai entendu l'angélus. Il faut dire que le clocher est à dix mètres. Mais j'ai assez bien dormi. La campagne est un lieu où je passe des bonnes nuits.

Le soir, je repense à M qui était chevrier. Il avait sa maison vingt mètres plus loin. Dans la partie basse, la chèvrerie abritait une quinzaine de chèvres. A l'étage, il vivait seul avec ses poules et son chien. Je n'ai vu sa cuisine qu'une seule fois : noire, sale, un chaos.
M est loin d'être un ignorant. Il m'a offert un jour un recueil de chants grégoriens. Je ne sais pas lire ces partitions, mais lui oui. Il aime beaucoup chanter les psaumes et animer la messe dans la petite église du village.
Chaque jour, il passait dans la rue avec ses chèvres et son chien. Elles mangeaient absolument tout ce qui dépassait et laissaient derrière elles des crottes sur le goudron.

Pour mon mariage, M nous avait fait cadeau d'un vase de verre rose. Cela m'avait touché. Et lorsque la sono s'était avérée insuffisante pour la fête, il m'avait ouvert l'église où j'avais pu emprunter l'ampli.
A un noël, j'avais emmené les enfants voir les chevreaux qui venaient de naître. Les bottes nous ont permis de patauger dans le purin qui remontait sous la paille. La chèvrerie n'était pas des plus propres.

M est tombé malade, a été hospitalisé. Les chèvres ont été vendues, sa maison est restée telle que. Quand il est revenu, il est allé vivre chez sa sœur, plus loin dans le village.
Il ne passe plus devant la maison en appelant ma femme. Il l'a connaît depuis très longtemps et l'a toujours beaucoup aimé.

Je ne l'ai pas revu ces derniers jours. Je n'ai pas serré sa grosse main gercée ni croisé son regard bleu rieur. Je ne l'ai pas vu dans son pantalon de travail bleu cachant à peine ses gros godillots fatigués, orphelins de lacets.
Un personnage M. Et gentil.

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